Dans les années 1980, Lamberto Bava décide de suivre, en toute logique, la tradition familiale. Le fils du grand Mario fut l’assistant de son père sur de nombreux films, et celui de Dario Argento (notamment sur Ténèbres). Lamberto est un artisan expérimenté et il a signé, en dehors des Démons produits par Argento, quelques bons films de genre comme Baiser macabre (son premier long métrage) ou Blastfighter l’exécuteur (un film d’action rural à la Rambo). Lamberto Bava réalise à son tour quelques « gialli », ces thrillers érotico-sadiques à l’italienne. En 1982, le succès commercial de Ténèbres relance la mode du « giallo » en Italie. S’ensuit une série de films qui pillent la recette d’Argento, avec moins de bonheur : esthétique suréclairée des séries TV, érotisme de papier glacé, vulgarité de l’Italie à l’époque où Berlusconi était un homme de médias et transformait (détruisait) l’industrie du spectacle. Delirium (Le foto di Gioia, 1987) documente tout ça, puisque le film se déroule dans les milieux de la presse de charme, et exhibe de nombreux signes extérieurs de richesse – le luxe clinquant des villas romaines. On y trouve des références à Six Femmes pour l’assassin, une galerie de personnages glauques, des visions surréalistes où les visages féminins sont remplacés par des masques grotesques. La chanteuse Sabrina est tuée topless par un essaim d’abeilles. La starlette Serena Grandi, qui dévoile ses formes généreuses, est la cible d’un maniaque. Amusant. Body Puzzle (1992) est peut-être plus sobre (voire télévisuel) dans la forme, mais le scénario est tout aussi délirant : un tueur en série récupère les organes de l’homme qu’il aimait sur les receveurs, pour reconstituer son amant défunt, comme un puzzle. En France, ces deux films n’ont bénéficié que d’une sortie vidéo. Body Puzzle a été l’un des derniers films distribués en Italie par l’importante compagnie P.A.C. avant sa faillite. C’est le véritable chant du cygne du « giallo ». Après un excellent coffret BR Démons 1 et 2, Carlotta poursuit son exploration de la filmographie très bis de Lamberto Bava, qui a œuvré tant bien que mal dans le cinéma de genre transalpin, tandis que ce dernier entrait dans une décadence irréversible. Ce coffret réunit deux « gialli » tardifs, Delirium connu aussi sous le titre Sentences de mort et Body Puzzle, dans la tradition des doubles-programmes des salles de quartier. Difficile de crier au chef-d’oeuvre devant ces productions. Elles possèdent néanmoins le grain de folie et le délicieux mauvais goût qu’apprécient les amateurs de cinéma d’exploitation italien.
Les films sont commentés par Gérald Duchaussoy et Romain Vandestichele, qui viennent de publier, toujours chez Carlotta, un petit livre d’entretien avec Lamberto Bava.
Ces deux films seront projetés vendredi 6 décembre à la Cinémathèque française, à 18h30 et à 21h, dans le cadre des fameuses soirées « cinéma bis », en présence de Bava junior.
Livre Lamberto Bava, conteur-né – Le frisson et l’émerveillement. Conversations
Gérald Duchaussoy & Romain Vandestichele
Carlotta Films
Inclus un cahier photos 12 cm x 16,5 cm | 150 pages.
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